Translations:A Duke Street 'DR'/5/fr

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Mais si son grain approche la perfection, la pipe, en revanche en est loin. En fait elle a une fissure superficielle qui court à l’horizontale sur la moitié de la tête. Et plus intéressant, celle-ci semble avoir été là dès l’origine. Il n’existe par exemple aucune décoloration qui pourrait indiquer une fissure de chaleur causée après l’achat de la pipe par un fumeur trop empressé. Bien plus, une inspection minutieuse du côté « net » de la tête laisse apparaître une continuation potentielle de la fissure juste en dessous de la surface. Ceci m’amène à supposer qu’au moment du ponçage et du polissage final de la tête le défaut était à peine apparent sur un côté et restait tout juste caché de l’autre, et lorsque la pipe a été fumée pour la première fois la fissure s’est juste assez ouverte pour qu’on la voit. Si ce n’est pas assez, alors que j’examinai la pipe en détail, j’ai noté trois ou quatre ‘sandspecks -sandpits ?- (différents des petits chocs que le fumeur a pu faire plus tard).

Mais ce qui m’intrigue le plus c’est que cette pipe avec son grain spectaculaire et ses défauts regrettables a été certainement contrôlée, approuvée et très probablement vendue par Alfred Dunhill lui-même. A cet égard je me souviens de la récente controverse apparue dans les cercles de collectionneurs lorsqu’il fut révélé que certains des meilleurs pipiers continentaux de l’époque moderne retouchaient les « sandpits » sur leurs pipes. En effet au milieu des années 1910 la petite boutique Dunhill de Duke Street s’apparentait bien plus aux petites affaires de ces pipiers continentaux d’aujourd’hui qu’au marchand de tabac d’envergure mondiale qu’il devait devenir à peine quelques années plus tard. Une décennie plus tard, très certainement, même si c’était à contrecoeur, cette pipe aurait été "dégradée" à cause de ses défauts, destinée à être marquée et vendue comme une Parker étant donné que les parois du fourneau n’étaient pas assez épaisses pour essayer d’en faire une Shell. Mais pour une boutique de pipes tout juste née, une telle pipe avait sans nul doute trop de valeur pour qu’on la mette simplement de côté. Tout ceci nous ramène à la nomenclature, et à une question. Alors que nous sommes à peu près sûrs que le stop placé avant le Dunhill était l’indication de la beauté du grain, l’utilisation d’un stop ovale était-elle accidentelle ou intentionnelle, pour avertir des défauts. Je crois que nous ne le saurons jamais, mais je suppose que si nous pouvions le demander aujourd’hui à Alfred Dunhill, il se souviendrait encore de ce jour, un siècle auparavant, où il a tenu en main pour la première fois cette superbe pipe et a dû prendre cette décision difficile.
[Un pipier expérimenté m’a appris depuis qu’en fait les fissures de la pipe étaient des fissures de chaleur.]